PAPA EN GREVE DE LA FAIM

Une Passerelle entre le 18 mai 2010 et le 10 mars 2012.

Samedi 10 mars 2012.  Rencontre. 

Après 653 jours de séparation absolue et injuste, la rencontre a bien eu lieu. Pour le plus grand bonheur et la plus grande joie de chacun. Un des plus forts et des plus intenses jours de ma vie.

Dans l'attente des conclusions des procédures en cours, j'interromps mes écrits sur ce blog, pour une relative sérénité et un  apaisement nécessaire au renouement.

Bien évidemment, la lutte continue jusqu'à ce que la justice soit rendue, et jusqu'au rétablissement d'un mode équitable de résidence alternée.

Mes fidèles anonymes peuvent me rejoindre sur Facebook (lepapadenina Grenoble) ou Netlog (lepapadenina): réseaux sociaux confidentiels, sélectifs, plus adaptés à la situation actuelle. 

Mes remerciements chaleureux à mes alliés de la première heure et aux autres.

Je ne citerai qu'une phrase de ma fille; sa première phrase suite à 15 minutes d'observation et de timidité.

Après l'avoir rassurée, je lui exprimais mon trac d'avant notre rencontre.... et ma crainte qu'elle m'ait oublié. A quoi elle a répondu, étonnée, spontanée, me regardant droit dans les yeux, pleine d'aplomb:

"Comment tu as pu penser une chose pareille?"

J'ai entendu le mot "papa", mot magique que j'attends depuis près de deux ans... 

Ma fille n'a pas 6 ans. Je redoutais qu'elle m'appelle "Monsieur". Je sais bien que cette idée parait absurde et sans fondements. Mais les parents privés de leurs enfants depuis longtemps savent de quoi je parle.

Merci ma fille de te battre avec tant de force, au milieu des conflits des adultes. A demain, mercredi, ma fille, mon trésor, ma richesse.

Bien à vous, Pascal

  Durant le mois d'août, la Passerelle ferme ses portes. On se retrouvera donc à la rentrée.

566ème jour sans ma fille

Face à mon domicile, un lampadaire en forme de T, et aux extrêmités de la barre horizontale du T, deux lumières s'illuminent la nuit tombée. Derrière ce lampadaire, un sapin de forme oblongue.
Un soir, lors d'un dîner, ma fille me dit tout à coup: "Papa! l'Arbre à Yeux vient de se réveiller!". Effectivement les ampoules venaient de s'allumer.
Il y a trois jours, je suis allé à la rencontre de ce tas de fer et ce sapin, pour le photographier. Je l'ai regardé, et me suis dit: "Oui, Nina, c'est un Arbre à Yeux, merci de me montrer ce que je ne vois pas!".

Depuis un an et demi, l'Arbre à Yeux a grandi, il porte un bonnet maintenant. La lenteur des procédures lui a donné froid.

- Dis papa, je t'avais bien dit que c'était un Arbre à Yeux!
- Oui Nina, ma fille... dis-moi encore "papa", je ne l'ai pas entendu depuis 566 jours...

557ème jour sans ma fille

                             Pascal Patenotte

Le papa d’Eva, un autre père, une autre histoire... de père. 

Il y a quelques mois ma compagne et moi sommes allés au Cinéma voir « Présumé Coupable »  film relatant le parcours de ce notaire accusé à tort dans l’affaire d’Outreau. Séance tardive, 22heures 30, nous étions trois spectateurs dans la salle. Devant nous, un homme s’indignait verbalement devant certaines scènes insoutenables, notamment l’inhumanité du juge Burgaud et certains passages de grève de la faim. Le film terminé, il s’est levé, nous a regardés, et a dit : « des erreurs comme ça, ça arrive encore aujourd'hui ! » Je suis resté bouche close et n’ai su dire que « bon courage à vous ». Puis je me suis levé et ai couru vers lui. Il nous a raconté son histoire, je la connaissais… c’était la mienne : accusations calomnieuses, plaintes pour non présentation d’enfant, lenteur de la justice, droit des pères bafoué, combat, aliénation parentale,  lieu de médiation, conflits de loyauté, crédit aux banques, crédit à l’énergie, crédit au temps, dégoût, indignation et révolte. Dans son vocabulaire manquaient les mots détermination, espoir, désir de justice et amour, il les avait trop utilisés. Puis nous nous sommes quittés sans papier ni stylo pour s’échanger nos coordonnées. Je lui ai dit « tapez lepapadenina » sur Google, mes coordonnées y sont, une pétition est en ligne ! ». Je m’éloignais alors de lui avec ma compagne. Je verrai toujours ce père, de dix ans de plus que moi, mais usé par trois ans de lutte, au milieu de la route, dans la nuit.  J’entends encore ses larmes retenues sortir bruyamment, telle l’eau stagnante qui brise le barrage. Je revois cet homme perdu, au loin, en pleine nuit, au milieu de la route dire : « je ne sais même plus où j’ai garé ma voiture ». Et crier « Papa de Nina, moi c’est le papa d’Eva ! » Eva a 6 ans, à peine quelques mois de plus que ma fille  Nina.

542ème jour sans ma fille

Mardi 8 novembre 2011, à 9 heures, Tribunal Correctionnel de Grenoble. La mère de ma fille à la barre des accusés, et moi sur le banc de la partie civile, suite à mes dizaines de plaintes portées de juillet 2010 à mai 2011 pour non présentation d'enfant. J'ai demandé un renvoi d'audience, qui m'a été accordé. Il semble en effet plus opportun d'attendre les conclusions de l'instruction et les diverses expertises . En rentrant chez moi, j'ai touché du bout des doigts les lettres de bois, en forme de clown, qui forment ton prénom, Nina, sur la porte de ta chambre... les yeux un peu troublés, Et me suis dis: comment en sommes nous arrivés là après près de 20 ans de vie commune. Puis je me suis très vite ressaisi. Le coeur du combat n'est pas le passé. C'est une page tournée. L'important, c'est demain, avec toi, ma fille. La justice est extrêmement lente mais les procédures s'accélèrent, et il semble que d'ici quelques mois, ma fille, tu retrouveras ta chambre aux lettres de bois en forme de clown.